Il t’a séduit avec ce portrait au crayon
portant cette estampille apparemment naïve : « una persona che
apprezzo molto ». En y repensant, rien n’est plus poétique que la représentation
fidèle (à quelques reflets près) du visage des lecteurs que l’on prétend
apprécier « vraiment beaucoup ». Narcisse, je n’ai jamais été,
né sans la clarté de visage adéquate, la « propreté » liminaire à
toute demande en mariage.
« Lovely friends » ou peut être autre
chose… Finalement, tout dépend de qui raconte l’histoire, de ce qu’on croit
avoir vécu, ce que notre esprit conçoit comme acceptable… Tu es restée là
pendant des mois à admirer ton reflet, son reflet, en le serrant désespérément
dans tes bras, comme pour exorciser la réalité d’une autre qui te hantait et te
faisait pleurer. Au fond tu as toujours su que cette autre avait sur lui une
emprise que tu n’aurais jamais, que tu as désespérément voulu avoir. Tu as tout
donné, est allée à toutes les fêtes, les beuveries, les orgies au nom d’une
jeunesse qui passe terriblement vite, au nom du juteux carpe diem.
Ne me dis pas que tu ne l’as pas aimé.
Maintenant, je suis là près du feu, à ressasser
ton passé et le mien aussi, à me demander s’ils sont digestes.
Toi qui as tant aimé
Ne me dis pas que tu ne m’as pas aimé