samedi 11 février 2017

Apitoiement

On a tellement attendu l'amour que, maintenant, l'autre n'est plus qu'une représentation incomplète et inaccessible de soi. Comme nous refusons d'embrasser l'absurde laideur qui rend exquise la réalité furtive, nous choisissons l'idée des êtres, l'idée d'un homme et celle d'une femme. Nous sommes au milieu de ces créatures virtuelles qui nous donnent une idée, que l'on sait pourtant fausse, de ce que l'amour aurait dû être mais n'a jamais été. Il est important de ramener tout cela à quelque chose de mécanique, un modèle qui ignore rugosité et frottements mais permet encore de prédire l'endroit et le moment qui nous feront retomber dans un sommeil mystérieux.
Il y a cette nécessité irrationnelle de dormir dans les bras de l'autre tous les soirs, au détriment de toutes les maximes à suivre pour espérer un bonheur futur. Peut-être que jusqu'ici on avait accumulé beaucoup de bonheur et que, maintenant, on le repartit dans le temps. Peut-être qu'en dépit des maximes, le monde nous appartient tout simplement.
Il y a le cas des êtres qui aiment des êtres aimés et aimants. Elle a un certain mépris pour les poèmes d'amour et les anagrammes. Avec le temps tu comprends qu'elle a un certain mépris pour tout ce qui ne brille pas comme un verre en argent dans une bouche. Elle n'écoute plus les paroles d'amour parce qu'elle en a déjà assez: une boîte rouge plutôt bien pleine.
On est trop jeunes pour posseder un tel regard.
Elle est mère d'une trahison plus fondamentale que la haine, en restant en surface, soi-disant pour éviter de consumer un autre lien d'amour, similaire à celui qui existe maintenant, mais d'une autre etoffe d'un ou deux ans. Vous avez un réel don pour rejoindre tous ceux qui dilapident le concept d'amour, en le rendant passager et contingent à l'obtention d'un diplôme ou d'une bourse.
On est trop jeunes pour être heureux.